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science fiction - Page 5

  • Prometheus (2012)

    Un film de Ridley Scott

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    Le nouveau film du réalisateur de Blade Runner était attendu, c'est peu de le dire. De retour à la SF et à l'univers qu'il a contribué à créer, Ridley Scott a attisé bien des curiosités sur ce prequel d'Alien qui n'en est plus vraiment un. Si le projet démarre en effet pour donner ses origines à la mythologie des Alien, une simple décision amènera des changements fondamentaux dans la production du film. 

    Dans le premier Alien (1979), des astronautes explorent une épave de vaisseau spatial et découvrent, au centre d'une immense salle ornée des décorations morbides et fascinantes de H.R. Giger, une gigantesque forme extra-terrestre à la tête d'éléphant, comme fossilisée dans son fauteuil d'observation. Il donne à la séquence une allure dantesque et marque durablement les esprits, d'autant plus qu'on n'en entendra plus parler par la suite. Cette seule scène, qui faillit d'ailleurs ne pas figurer dans le film au regard de son coût exorbitant (500 000 dollars rien que pour le décor), tient en germe l'idée d'une préquelle, explorant l'identité de ce mystérieux alien. Cette mystérieuse tête d'éléphant n'est pas la forme physique de l'extra-terrestre, mais plutôt une combinaison spatiale, un exosquelette qui renferme un être à forme humanoïde ! De cette idée, découle le virage thématique du film, qui, plutôt que de s'inscrire dans la lignée des Alien, explore cette nouvelle race, dont des chercheurs vont retrouver la trace et qu'ils nomment Ingénieurs. 

    Prometheus élargit dès lors la portée des Aliens précédents, en connectant les Ingénieurs à la race humaine et à la Terre, dès la fabuleuse séquence d'ouverture. Une caméra planante cadre des paysages vierges et majestueux, soudain surplombés par l'ombre d'un vaisseau spatial. La caméra Red Epic 5K fait des merveille et produit une image ultra-détaillée, agrémentée d'une très belle richesse de teintes. On y découvre un des Ingénieurs qui va, par son sacrifice, créer la vie sur Terre. Rien de moins ! Certes, cette vision des choses est un grand classique de la SF, mais il est amené avec une telle grâce que ce début nous fait tout de suite embrasser une mythologie complexe, somptueusement agrémentée de la mélodie composée par Marc Streitenfeld, tenant là un prolongement cohérent à celle de Jerry Goldmith dans le film original. 

    Si la première heure est très réussie, emmenant une équipe de scientifique à la découverte de nos origines, l'arrivée sur la planète laisse la place à beaucoup d'actions qui mettent à mal le rythme mesuré des séquences précédentes. Les personnages sont globalement détestables ou nous laissent indifférents (tel ce scientifique qui après passé deux ans de sommeil en cryogénie, en envoie balader un autre sous prétexte qu'il est venu uniquement pour gagner de l'argent) ; les dialogues, rares, sont vraiment basiques et nous ramènent aux actioners bourrins des années 80. 

    En voulant faire trop de mystères, Scott et ses scénaristes (dont Damon Lindelof, venu de la série Lost, également très généreuse en énigmes) ont tendance à frustrer le spectateur, notamment lors d'une rencontre avec l'Ingénieur qui n'apporte aucune explication. Les scènes coupes visibles en vidéo voient se desiner un autre film, plus fouillée sur la psychologie des personnages (une belle scène entre le capitaine du vaisseau Prometheus et Vickers, femme autoritaire qui dirige d'une main de fer l'expédition, ou une autre en Vickers et Peter Weyland, l'industriel qui a financé la mission) et sur les explications de textes (la fameuse rencontre avec l'Ingénieur est allongée, la scène finale est aussi bien plus explicite sur al destination de la scientifique Shaw) ; le mystère est un vrai choix de Scott, et l'on est en droit de préférer cette version, certes fantasmées, plus longue, qui aurait donné davantage de clés au spectateur.

    Soyons clairs : les défauts objectifs énoncés ci-dessus n'anéantissent pas l'intérêt suscité par le film : ce n'est juste pas un film parfait, et au lieu d'un potentiel très grand film, Prometheus reste en l'état un grand film de science-fiction, comme on n'en a rarement vu dans les années 2000. C'est dire si la suite prévue, pour l'instant titrée Paradise (ironiquement un des titres prévu à l'origine pour Prometheus), toujours réalisée par Ridley Scott, suscite une fois encore toutes les attentes... en espérant que les réponses soient à la hauteur !

  • Star Trek : Insurrection (1998)

    Un film de Jonathan Frakes


    8047784358_cc5e47bae6_m.jpgGalvanisé par la réussite artistique et commerciale de Premier contact, Rick Berman propose à Jonathan Frakes de réaliser un nouveau Star Trek, qui porte à neuf les adaptations cinématographiques des séries TOS et TNG.  Dans celui-ci, la Fédération colonise de nouveaux espaces, implantant des populations sur de nouvelles planètes, et découvre le secret d'un petit groupe, les Ba'ku : leur planète leur permet de rester jeunes à tout jamais. Afin de pouvoir exploiter cette fontaine de jouvence, ils doivent être déportés afin d'en faire profiter le plus grand nombre. Leurs ennemis jurés, les Son'a, sont à la manœuvre, avec l'appui de la Fédération qu'ils maintiennent dans l'ignorance de leur motivation réelle. Les So'na ont également une longévité importante, mais uniquement grâce à de fréquentes interventions chirurgicales -qui rappellent la torture de Ida Lowry dans Brazil (Terry Gilliam, 1985). La recherche de la mystérieuse alchimie produite sur la terre des Ba'ku les rapproche du personnage de Soran dans Star Trek : Générations, lui aussi obsédé par la quête de l'immortalité.

    Comme souvent, Trek se veut une parabole sur le monde contemporain : ainsi, Terre Inconnue faisait explicitement référence à la catastrophe de Tchernobyl. Ici, la stratégie de génocide voulue par les Son'a rappelle les heures douloureuses de la tragédie du Rwanda en 1994, lorsque le gouvernement rwandais, composé de Hutus, décida de réduire à néant la population Tutsis. La consonnance même des noms des peuples dans Insurrection ne laisse pas de doute sur la transposition des événements. Dans la fiction, le commandant Picard n'hésite pas à défier l'autorité : ainsi, lui et son équipage iront protéger la population Ba'ku contre les directives de la Fédération, en signe de véritable rébellion, pour participer à l'Insurrection du titre. Il faut dire que l'équipage a eu la chance de découvrir la qualité de vie des Ba'ku, qui ne souffre d'aucune contre-partie dérangeante, comme c'est souvent le cas dans les mythologies de science-fiction. Effectivement, la découverte du lieu de vie des Ba'ku peut faire penser dans un premier temps à Justice, épisode issu de la saison 1 de Star Trek : The Next Generation ; la découverte d'un véritable jardin d'éden -à l'allure assez torride pour une production tv de l'époque- où la valeur ultime est le plaisir cache en réalité un pénible secret : des mises à mort régulières décidées pour protéger leur environnement. Un bien bel environnement figuré par le cadre idyllique du lac Convict, dans le Sierra Nevada, qui inonde l'écran de son bleu azuré : une certaine idée du paradis.

    Si la terre des Ba'ku est un reflet du Paradis chrétien, Picard se pose en Sauveur et guide le peuple à la façon de l'exode biblique. Un récit fort en symbole donc, qui ne s'empêche pas pour autant des notes d'humour à répétitions. Et, si certaines sont réussies (la tresse de cérémonie de Picard au début, ou l'esquisse d'un pas de mambo par le même Picard, rajeuni par la force régénératrice de la planète-, d'autres tirent en longueur, à l'image d'une chanson poussée par Data, ou ses enfantillages sur la planète Ba'ku.

    Si la thématique est claire et louable, sa mise en forme pêche un peu dans cet opus : des détours scénaristiques sont tirés par les cheveux (le So'na se rallie un peu vite à la cause défendue par Picard, et la façon d'arrêter le méchant Ru'afo - F. Murray Abraham - s’embarrasse de trop de prétextes techniques, le fameux "tech talk" dénoncé par Ronald D. Moore dans les commentaires audio de Générations et Premier Contact). Pour autant, il restera deux excellentes utilisations d'artefacts science-fictionnelle dans ce film : l'un, le Holodeck, qui permet de créer un environnement virtuel à bord de l'Enterprise, apporte un excellent coup de théâtre dans le dernier acte, bien mieux senti ici que dans le pourtant excellent Premier contact. Dans une moindre mesure, le concept des pistolets télétransporteurs, qui met à mal l'échappatoire des Ba'ku, est aussi une trouvaille qui renouvelle l'imaginaire de la saga. Les effets spéciaux sont par ailleurs omniprésents dans le film, Insurrection étant le premier Star Trek à n'utiliser que des effets intégralement en images de synthèse. Elles proviennent en partie du studio Blue Sky, connu aujourd'hui pour ses films d'animation, comme L'âge de glace (Chris Wedge & Carlos Saldanha, 2002).

    Finalement, Insurrection n'est pas un si mauvais Star Trek, mais pâtit d'un manque de cohérence générale, réactivant la malédiction des chiffres impairs dans la saga, les opus 3, 5 et 7 étant les plus faibles -mais avantage inégalable au V : l'Ultime frontière, nanar effectivement ultime issue de la mythologie Star Trek.

  • Star Trek : Premier contact (1996)

    Un film de Jonathan Frakes

    7859578744_c09a56879c_m.jpgPeu de temps après le succès public de Generations, le producteur Rick Berman confie à nouveau le scénario du prochain Star Trek au duo Moore-Braga, en même temps qu'il laisse les rênes de la réalisation à Jonathan Frakes, acteur-réalisateur sur la série Next Generation. Bonne pioche : Premier contact est la plus grande réussite des film "Next Generation", en même temps qu'un des rares Star Trek à pouvoir rivaliser avec les meilleurs films de science-fiction de la décennie 90.

    L'introduction du film cueille littéralement le spectateur, sa séquence générique habitée par la superbe musique de Jerry Goldsmith, qui signe ici rien de moins que la meilleure mélodie de toute la saga, tout en réinterprétant dans les premières notes son thème historique. La partition du cor, qui s'octroie la mélodie principale, offre une émotion palpable ; moins flamboyante que le thème connu d'Alexander Courage, plus sombre et mélancolique, elle évoque la chaleur des retrouvailles avec un équipage non dénué d'humour (notes fortes, héroïques), tout en ouvrant sur l'inconnu de l'exploration spatiale (les notes lointaines, comme un écho, semblant se perdre dans l'immensité) ; à ce titre, on peut sans mal dresser une filiation entre ce magnifique score et certaines mélodies d'Howard Shore pour Le Seigneur des Anneaux, composées quelques années plus tard. Premier choc.

    Puis, le film débute avec un très gros plan sur l’œil du Capitaine Picard, filant en travelling arrière, faisant peu à peu découvrir un amas de constructions métalliques, une sorte de ruche dans laquelle des formes apparemment humaines sont ordonnées, rangées... préfigurant là encore un grand film de SF à venir, Matrix et ses champs à cultiver les humains. La force visuelle du plan, associée au contraste saisissant entre celui-ci et la lenteur bienfaisante du générique, présente à merveille la menace du film : les Borgs, sorte de zombies cybernétiques dotés d'une conscience collective. Ce plan, puis les suivants, établissent également la connexion très spéciale qui existe entre les Borgs et Picard, ce dernier ayant été assimilé au collectif Borg dans un épisode lointain de la série. La séquence prend la forme d'un rêve emboîté, ressort qui fonctionne toujours très bien (on se rappellera avec bonheur et frayeur la dernière scène du Prince des Ténèbres de John Carpenter, qui utilisait ce procédé).

    Berman, le producteur, voulait avoir un voyage dans le temps ; les scénaristes, eux, apportèrent l'idée de la menace Borg, la force négative la plus réussie de la série. De ces deux idées-forces proviennent tout ce qui fait de Premier contact, non seulement un excellent Star Trek, mais encore plus, un très bon film de SF, le spectateur totalement novice en histoire et généalogie Trek pouvant apprécier le film pratiquement de la même façon.

    Les Borgs sont visuellement très photogéniques, dans la voie de l'esthétique de horreur : arnachés d'armures bio-mécaniques, leurs visages recomposés en fait des monstres de Frankenstein tout à fait convaincants. Dans un trip très Aliens, l'apparition de la reine Borg est éclatante, l'actrice Alice Krige jouant à merveille d'une ambiguïté sexuelle dont Data (excellent Brent Spiner !) va faire les frais. Le "supplice de la peau humaine" est une idée fantastique dans un monde imprégné de techno-robotique, et où même le capitaine Picard peut apparaître comme insensible. 

    Le voyage dans le temps permet cette fois une véritable prouesse : remonter aux origines même du monde inventé par Gene Roddenberry, et être témoin de son éclosion. Le premier contact est en effet le moment historique où des êtres extra-terrestres s'intéressent pour la première fois à la planète Terre, rencontrant leurs occupants ; ainsi débutera une ère de coopération pacifique et d'exploration spatiale.

    Faire intervenir des personnages humains du passé permet en outre de donner au film une tonalité comique bien plus réussie que la dernière tentative en date dans l'univers Star Trek (Star Trek IV - Retour sur Terre, avec Spock et son bandana de karatéka). Le personnage de Lily, notamment, nous permet une identification totale, elle qui est amenée à bord de l'Enterprise, et qui découvre un monde futuriste aux préoccupations bien différente (au XXIVème siècle, l'argent n'existe pas, des vaisseaux volent de planètes en planètes et les pistolets laser remplacent les armes plus conventionnelles). Son échange avec Picard, près de la fenêtre donnant sur l'espace et la Terre, est une merveille d'éblouissement. Le personnage de Zefram Cochrane, inventeur historique de la distorsion -technique qui permet à un vaisseau de se déplacer plus vite que la lumière-, est interprétée par un James Cromwell déchaîné ; c'est un soûlard qui se dandine en écoutant du Roy Orbison. De plus, Jonathan Cochrane instillait une atmosphère très détendue qui transparait clairement à l'écran, surtout lors des séquences sur Terre, où Frakes a toujours l'air à deux doigts du fou-rire. Seule la scène de l'holodeck, incluant Picard et Lily dans le monde des gangster, ne trouve pas vraiment sa place dans un ensemble autrement fort bien écrit, réactivant les idéaux transmis par Roddenberry depuis les années 60.

    A tous les niveaux où on pouvait l'attendre, ce Premier contact est réussi ; à l'époque plus gros succès de la franchise, il réconcilie enfin les fans de Star Trek et les novices amateurs de science-fiction.

    En bonus, le fabuleux morceau d'ouverture de Jerry Goldsmith : 

  • Star Trek : Générations (1994)

    Un film de David Carson

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    Les scénaristes Ronald D. Moore et Brannon Braga ont eu fort à faire en se chargeant du scénario de ce septième épisode cinématographique de la franchise Star Trek. L'objectif : faire se rencontrer les capitaines des deux vaisseaux Enterprise, l'historique James T. Kirk (Star Trek : la série originale, 1966-1969) et le capitaine Picard (Star Trek : The Next Generation -TNG-, 1987-1994), stars des deux séries créées à 30 ans d'intervalle par Gene Roddenberry, et ainsi mettre un point final à la carrière de Kirk. Alors que Kirk et son équipe d'irréductibles ont fait partie des six premiers films cinéma de 1979 à 1991, il s'agit du premier avec l'équipage de TNG. A l'époque, Star Trek connaît un pic de popularité sans précédent : TNG connaît un si grand succès que d'autres séries verront le jour dans son sillage : Deep Space Nine en 1993, puis Star Trek : Voyager en 1995. Lors de la sortie du film, accompagnée par un battage médiatique sans précédent pour la franchise, William Shatner (Kirk) et Patrick Stewart (Picard) posent ensemble pour la une du Time : c'est historique. Ronald Battlestar Galactica D. Moore et Brannon Braga sont déjà scénaristes depuis plusieurs années sur la série TNG quand ils se voient confier leur périlleuse mission, qui constitue donc leur première incursion sur un film cinéma. Les difficultés subsidiaires du projet sont également de présenter au public non averti de nouveaux personnages, sans pour autant ennuyer les fans qui les connaissent par cœur. 

    Dans l'univers Star Trek, la série originale et TNG sont distantes de 78 ans. Toute la question tourne autour de l'astuce à employer pour réunir les deux personnages centraux. Le voyage dans le temps, utilisé à de nombreuses reprises, ne sera pas privilégié, au profit d'une invention un brin compliquée qui, si elle constitue le centre du film, en est également sa principale faiblesse. 

    L'axe principal du film, rassemblant deux générations de capitaines (et de fans, donc), est le temps. Si le film commence au temps de Kirk vieillissant, visitant pour la première fois un vaisseau Enterprise dont il ne sera pas capitaine (amusants dialogues entre Kirk, Scottie et Chekov). On y voit Kirk se sacrifier alors que le vaisseau est absorbé par un phénomène spatial, puis l'on passe rapidement "78 ans après" où l'Enterprise devient ... un bateau datant de l'ère de la piraterie, costume d'époque compris. Jouant de l'analogie entre l'esprit naval (très présent sur les films, moins sur la série originale), les scénaristes imaginent une sortie de l'équipage de Picard dans le Holodeck, cette salle du vaisseau Enterprise qui peut recréer à loisir n'importe quel environnement. Cette séquence permet de tracer une chronologie de l'Enterprise, plusieurs vaisseaux portant le même nom au fil du temps, constituant un lien indéfectible entre les époques. La contradiction entre aspect futuriste et artefacts anciens donne tout son sel à la séquence, et dévoile également une des constantes du film : être là où on ne l'attend pas.

    Le temps, c'est également l'obsession du méchant du jour, Soran (Michael McDowell, excellent comme toujours) ; il recherche l'immortalité après avoir goûté aux délices du Nexus, cet endroit en dehors du temps où l'on ne vieillit pas. Chacun y recrée par la pensée son univers idéal, ce qui donne une séquence totalement décalée sur le capitaine Picard, débordante de mièvrerie. Celle sur Kirk est encore moins réussie, Picard le découvrant coupant du bois et faisant la cuisine... Si le Nexus ressemble fort à une vision du Paradis chrétien, il est également inutilement embrouillé dans sa représentation cinématographique car on doit y aller (première gageure) et pouvoir en revenir (alors là...), alors même que l'espace n'y a, pas plus que le temps, aucune importance : la seule pensée nous déplace dans le temps et dans l'espace. Les deux scénaristes, dans leurs commentaires audio des années après la sortie du film, en conviennent facilement : ils n'ont pas pris le meilleur parti du concept de base.

    Pas évident donc, de s'y retrouver, même si des bonnes surprises surnagent : un humour bienvenu, notamment grâce à l'excellent personnage de Data (Brent Spinner), équivalent de Spock dans la nouvelle série, puis aux collègues de Kirk au début du film, qui tranchent avec la droiture de Picard. Le temps, l'espace, la mort, la fin de Kirk... Trop d'éléments à digérer pour un seul film, qui s'égare dans des séquences voulue tellement "originales" qu'elles sont incongrues. La mort de Kirk est ainsi traitée en mode mineur, malgré un reshoot d'envergure (il devait succomber d'un coup de feu de pisto-laser dans le dos, asséné par Soran!). Bref, trop d'enjeux ont tué ce Générations, qui devait pourtant redonner un nouveau souffle à la saga, en abandonnant d'ailleurs la numérotation des précédents films. Malgré les bonnes scènes du crash ou encore de la carte stellaire, un résultat bien moyen. Anecdote parlante de la bouche des scnéaristes : travaillant au même moment sur le scénario du double-épisode final de TNG, All Good Things, ils trouvent ce dernier... bien meilleur !

  • Star Trek VI : Terre inconnue (1991)

    Un film de Nicholas Meyer

    7643149614_9f48f498c9_m.jpgAprès le désolant cinquième épisode (L'ultime frontière), Paramount décide de mettre en chantier le dernier film incluant le casting original de la série télé : Shatner / Kirk, Nimoy / Spock, Kelley / McCoy, ... Il est clair que terminer sur le souvenir embarrassant (litote) du film réalisé par Shatner aurait été une erreur. Le retour de Meyer à la réalisation est également une nouvelle appréciable, tant sont deuxième épisode (La colère de Khan) et son très bon C'était demain (Time after time, 1979) sont réussis. Meyer, Nimoy et le scénariste Denny Martin Flinn élaborent un scénario riche et intrinsèquement lié à son époque : la scène inaugurale, montrant l'explosion d'une planète, suivie d'un onde de choc aux proportions atomiques, fait écho à l'explosion de la centrale nucléaire de Tchernobyl en 1986. Les répercussions de cette explosion dans le film (privés d'une grande partie de leur ressource énergétique, les Klingons, éternels ennemis de la Fédération, demandent de l'aide et la suppression de la zone neutre -leur mur de Berlin, tombé quelques mois plus tôt dans la vie réelle) sont clairement une transposition des préoccupations contemporaines de la société.

    Le capitaine Kirk, hanté par le meurtre de son fils par les Klingons (voir l'épisode III, A la recherche de Spock, 1984), est submergé de ressentiment, et, alors même qu'il est tout entier contre la pacification des relations Fédération / Klingons, va en être le messager. Les antagonismes entre civilisations, le racisme exprimé, les incompréhensions, sont évoqués frontalement, en même temps qu'un effort de pacification cher à la mission première des équipages de Starfleet. Le comportement des hommes de Kirk, et parfois de Kirk lui-même dans la première partie ("Qu'ils meurent !") sont néanmoins exagérés, pas très cohérents par rapport à la psyché de leur personnage, créés uniquement dans le but de dessiner une trajectoire d'apaisement et enfin, de réconciliation avec leur némésis ultime. Sur l'équipage, qui voit s'étendre le voile de la vieillesse, se pose la question de leur rôle, leur utilité au sein de Starfleet une fois "mis à la retraite", comme le glisse Kirk à Bones au début du film. Et, clairement, la question fonctionne dans la fiction comme dans la réalité.

    Certains passages sont vraiment marquants ; j'en retiens un tout particulièrement : l'attaque de deux individus masqués sur le vaisseau Klingon, alors en état d'apesanteur. La lenteur des corps qui flottent légèrement dans le vaisseau, soutenus par une musique symphoniques aux accents lourds et menaçants, donne un prégnant sentiment d'étrangeté. Les deux mercenaires éliminant tous les individus qu'ils croisent, marchent lentement, sans bruit aucun, autour des bulles de sang Klingon qu'ils ont eux-mêmes provoqués. La séquence, soldée par la mort du Chancelier diplomate Gorkon (ainsi nommé pour rappeler Gorbatchev, et arborant la barbe de Lincoln), réunit de remarquables qualités cinématographiques, là où montage, effets, musique, échelle de plan, servent le contenu : une intrusion implacable de deux tueurs.

    La richesse narrative du film, passant d'une attaque surprise sur le vaisseau Klingon, à une évasion glaciales des mines de Rura Penthe, sans oublier un dîner pour le moins tendu entre l'équipage de l'USS Enterprise et leurs anciens ennemis, offre une variété bienvenue dans l'univers codifié de Star Trek. La profondeur des thèmes évoqués sied  tout à fait à la science-fiction humaniste telle que mise en place par son créateur Gene Roddenberry, auquel le film est dédié. La terre inconnue, c'est cet espace-temps qui s'ouvre devant les personnages, un avenir sans conflit ; enfin du moins, c'était l'objectif...